Préoccupations et visions communes du 1er FMSD

Préambule

Ce texte est le résultat du 1er Forum Mondial Sciences et Démocratie qui s’est tenu les 26 et 27 janvier 2009 à Belém (Brésil). Il a été écrit et endossé par les délégués de 18 pays et 4 continents. Il instaure un processus global, inclusif et ouvert avec pour objectif de construire un réseau international de mouvements, d’organisations et d’individus concernés par les questions de science, de technologie et d’autres formes de savoirs en lien avec les préoccupations sociétales et démocratiques.

Constats et questions

1. Tous les savoirs, sciences incluses, constituent un héritage commun de l’Humanité. Élargir la connaissance a été l’une des plus fondamentales quêtes humaines tout au long de l’Histoire.

2. La connaissance et ses méthodes de production peuvent avoir pour résultat l’émancipation et le progrès des sociétés autant que leur domination et leur oppression.

3. Nous soutenons les régimes qui assurent et promeuvent les biens communs et les systèmes de valorisation d’innovations qui ne sont pas fondés sur la création de monopoles ou de profits dérivés de la connaissance.

4. Les questions relatives aux sciences et technologies (S&T) constituent une part importante de la grande crise économique, climatique- écologique et démocratique à laquelle le monde fait face aujourd’hui. Elles font aussi partie de la crise relative aux usages et à la production d’énergie, à la sécurité alimentaire, à la guerre et à la militarisation de nos sociétés. Il est nécessaire de mieux comprendre en quoi les enjeux liés aux S&T font partie des problèmes mais aussi des solutions à de telles crises.

5. Nous devons reconnaître que les valeurs portées par les communautés scientifiques se sont formées et sont enracinées dans des processus historiques et culturels. L’autonomie et la responsabilité sociale des chercheurs, l’ouverture et l’universalité de la science doivent être défendues tout en répondant à la diversité sociale et culturelle contemporaine.

6. Nous reconnaissons que différentes formes de régime de production de connaissance existent partout dans le monde, à différents niveaux, incluant à la fois les institutions scientifiques et les communautés locales. Les contextes historiques influencent les développements politiques, culturels, éducatifs et scientifiques des sociétés en donnant naissance à une diversité de production de connaissances tant académiques que traditionnelles. Une nouvelle écologie de la connaissance répondant à différents régimes de propriété de la connaissance est aujourd’hui nécessaire. Dans ce contexte, nous soutenons des initiatives telles que l’accès ouvert aux publications scientifiques ou l’auto-archivage scientifique.

7. Nous devons renforcer l’engagement raisonné des citoyens dans les processus de prise de décisions dans le domaine des politiques S&T aux niveaux international, national et local.

8. Il y a une réelle nécessité de changer la situation actuelle de la recherche, de la technologie et de l’innovation qui sont conduites par les intérêts du marché, le profit privé, la culture consumériste et les usages militaires.

9. Nous nous engageons pour que le respect de la vie humaine soit au cœur de la pratique scientifique. Aussi appelons-nous la communauté S&T à ne pas s’engager dans la recherche à usage militaire.

10. Il y a un pressant besoin de faire la promotion de la demande sociale et de renforcer les capacités des gens pour qu’ils puissent exercer un contrôle démocratique des politiques de recherche et d’innovation.

11. Les systèmes de recherche collaborative, de recherche bottom-up et de recherche participative doivent être promus.

12. Nous visons à créer un réseau international qui souligne l’importance des S&T d’une part, tout en gardant à l’esprit une approche critique des dérives des S&T notamment sur les questions démocratiques et environnementales dans un contexte de globalisation capitaliste.

13. Ce réseau ouvert inclura à la fois la communauté des scientifiques et ingénieurs et les mouvements sociaux. Nous établirons un dialogue démocratique et une collaboration entre organisations scientifiques et sociales.

14. Ce réseau se fixe pour objectif de renforcer les mouvements qui contestent la manière dont les S&T sont accaparées par des intérêts industriels, privés, militaires, politiques ou des formes de pouvoirs, qu’elles soient étatiques ou non, qui ont un impact sur les valeurs éthiques et la production de connaissance en S&T.

Ce texte s’adresse :

  • aux scientifiques, ingénieurs, universitaires, éducateurs, experts et leurs institutions partout dans le monde ;
  • aux populations autochtones, organisations paysannes, syndicats, mouvements sociaux et politiques, ONG, organisations et institutions travaillant sur les questions S&T ;
  • aux acteurs des forums sociaux locaux, régionaux et mondiaux ;
  • aux autorités publiques internationales, régionales, nationales et locales partout dans le monde.

 

Les sciences, la recherche, les technologies et l’innovation sont liées à des questions essentielles pour le futur de nos sociétés et de notre environnement. Nous invitons chacun d’entre vous à ajuster vos agendas et priorités politiques avec le présent document.

Nous invitons les organisations scientifiques et sociales, les acteurs des forums sociaux et les citoyens autour du monde à élargir et renforcer ce mouvement dès maintenant et à se joindre aux actions suivantes :

  • en janvier 2010 : Forums régionaux Sciences et démocratie
  • en janvier 2011 : 2e Forum Mondial Sciences et Démocratie

 

Nous invitons toutes les organisations sociales et scientifiques, les mouvements et les réseaux à organiser des débats publics autour du monde pour permettre à la majorité des membres de nos communautés et sociétés respectives à faire entendre sa voix sur ces questions.

Belém (Brésil) – 1er février 2009.

Disponible en / Available in: Anglais, Espagnol, Portugais - du Brésil